#372 - mai/juin 2024
Tisser son identité
Quand l’EVRAS sert de fil
#372 - mai/juin 2024
Evras : les dessous d’une panique morale
L’Education à la vie relationnelle, affective et sexuelle (Evras), c’est avant tout un dispositif qui accompagne modestement (4 malheureuses heures perdues au milieu des études primaires et secondaires) les enfants et adolescents dans leur devenir de citoyens responsables et épanouis dans leurs relations humaines, capables d’assumer leurs choix dans le respect de soi et des autres. Elle fait partie de la promotion de la santé à l’école.
L’Evras est une des missions de l’enseignement obligatoire depuis 2012. Mais en vrai, moins de 20 % des élèves en Région de Bruxelles-Capitale ont bénéficié d’au moins une animation en 20181. Il faut attendre juillet 2023 pour que le cadre législatif change en faveur d’une généralisation du dispositif à tous les élèves.
En réaction, des manifestants anti Evras ont battu le pavé en scandant “Ne touchez pas à nos enfants !”, persuadés que les animations représentent une menace civilisationnelle ciblant directement les élèves. Fin 2023, pas moins de six écoles ont été incendiées dans la région de Charleroi ; à ce jour, l’enquête est toujours en cours.
Faire de l’Evras n’est pas facile. Mais comment en est-on arrivé à ces exaspérations et à tant de désinformation ? Qui sont ces manifestants, curieux conglomérat de groupes d’extrême-droite et de parents conservateurs catholiques et musulmans ? Pourquoi l’Evras les heurte-t-il tant ? Comment les professionnels répondent-ils à ces tensions ? Qu’est-ce que cette panique morale dit de la société? Et avant tout, qu’est-ce que l’Evras ? Pourquoi, des 5 lettres de l’acronyme, les anti n’ont-ils retenu que le S – la sexualité qui alimente les débats et génère des peurs irraisonnées, surtout quand elle concerne les enfants ? Même dans une société qui se dit libérée, la sexualité reste un sujet sensible, voire tabou, car elle touche à nos valeurs, à l’intime. Et paradoxalement, la sexualité est partout: au cinéma, sur internet, dans l’espace public.
[1] Lire A. Lannoo, C. Duchêne, I. Godin et I. Tojerow, “Comment (vraiment) généraliser l’Evras à Bruxelles”, in Brussels Studies 183, 2023.
SOMMAIRE
Les dissensions autour de l’Evras permettent de mettre en lumière des problématiques, et invitent au débat. Avoir une mise en tension des points de vue fait aussi partie de l’Evras !
Comme nous l’expliquent celles et ceux qui les font vivre, les animations Evras sont plus nécessaires que jamais dans une société traversée par les violences sociétales et de genre.
Rencontre avec les associations de parents et les réseaux opérateurs de l’enseignement catholique et officiel autour de l’Evras.
Lola CLAVREUL et Célia DIDIER
Fédération des Centres pluralistes de planning familial
Avec l’Evras, il s’agit de permettre aux jeunes de tisser leurs propres chemins entre les injonctions familiales, culturelles, religieuses, amicales, sociales.
Dans le guide Evras, la diversité des orientations sexuelles et des identités de genre n’est pas invisibilisée. Ce qui ne plaît pas à une minorité de contestataires.
Entretien avec Myriam MONHEIM
systémique Que répondre aux opposant·es de l’Evras qui craignent que déconstruire les stéréotypes de genre conduit à promouvoir la transidentité ?
Entretien avec Camille HUSSON et Marion LORY
Dans le spectacle SEXPLAY Nos Panthères Nos Joyaux, il est question de sexualité(s), de tabous, de chemins non balisés par les conventions.
Entretien Pierre-Olivier ROLLIN
L’art n’est jamais scandaleux ; c’est la société qui se scandalise. Alors, une éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle à travers l’histoire de l’art : pourquoi pas !
Dans la rue, pas besoin de code d’accès pour voir du et des sexe(s). Pas besoin de contrôle parental. Aucune explication. Aucun accompagnement. On zyeute.
Entretien avec Andrea REA & Antoine ROBLAIN
La manière de questionner l’hospitalité n’est pas indépendante des politiques d’accueil. Il s’agit d’ancrer le micro (la relation entre l’invitant et l’hôte) dans le macro (la politique d’accueil).
Dessin : Barrack Zailaa Rima. Texte : Nathalie Caprioli.
Voici une histoire très bruxelloise, quand un Guinéen rencontre une famille hispano-luxembourgeoise via Singa, asbl créatrice de liens en cohabitation solidaire entre Bruxellois et réfugiés.