Mémorandum pour la politique du parcours d’accueil en Région de Bruxelles-Capitale


Le Centre Bruxellois d’Action Interculturelle (CBAI), fort de son expérience dans l’accompagnement et le suivi de la politique d’accueil en Région de Bruxelles-Capitale, propose un état des lieux et des recommandations à prendre en compte en vue de la future déclaration gouvernementale de la Région de Bruxelles-Capitale. Ces recommandations s’inscrivent dans le cadre de l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 20 juillet 2023 de la COCOM qui établit un parcours d’accueil bicommunautaire.

 

Une offre efficace et de qualité, mais qui fait face à des enjeux.

Malgré l’efficacité et la qualité du parcours, certains enjeux cruciaux de l’intégration des personnes migrantes restent problématiques, tels que la situation financière, l’accès à l’emploi et les conditions de logement. En cause, des facteurs structurels extérieurs à la politique du parcours d’accueil, qui viennent amoindrir son impact : crise du logement, discriminations, inadaptation de l’offre d’ISP aux réalités des personnes migrantes, lourdeurs administratives.

 

Une offre saturée.

Suite à l’entrée en vigueur de l’obligation et l’élargissement du public cible, les bureaux d’accueil sont aujourd’hui dans un état de saturation et ont dû ouvrir des listes d’attentes. Les capacités budgétaires existantes  qui permettent de proposer 6000 parcours simultanés ne semblent pas suffire à absorber les flux induits par les changements mentionnés. Cette situation de saturation risque d’avoir des impacts négatifs sur la qualité de l’offre, et donc sur son efficacité, notamment sur l’accompagnement social proposé dans le cadre du parcours.

Le CBAI recommande de doter la politique du parcours d’accueil des moyens budgétaires nécessaires pour faire face à la situation de saturation et garantir la qualité du dispositif.

 

Reconnaitre et consolider la capacité d’initiative des bureaux d’accueil.

Le développement d’activités complémentaires (hors du financement prévu par l’ordonnance) permet aux bureaux d’accueil d’une part de mieux s’adapter aux spécificités de leurs publics respectifs et d’autre part de mieux rencontrer les objectifs de la politique du parcours d’accueil en palliant aux insuffisances de l’offre telle qu’elle est prévue dans la législation.

Le CBAI recommande de soutenir et de consolider la capacité d’initiative des bureaux d’accueil, notamment à travers une réflexion sur la pérennisation de ces actions, qui dépendent bien souvent de subsides temporaires.

 

Renforcer la cohérence entre la politique du parcours d’accueil et les autres politiques publiques.

L’intégration des personnes migrantes ne peut pas être pensée de façon insulaire en restant cantonnée à une politique spécifique, aussi pertinente et utile soit-elle.

Le CBAI recommande de renforcer la cohérence entre le parcours d’accueil et les autres politiques publiques, et de faire de l’intégration un sujet transversal de l’action publique.


Concernant l’insertion socio-professionnelle, des recherches quantitatives et qualitatives du CBAI ont montré que l’insertion socio-professionnelle des personnes migrantes est limitée par des obstacles extérieurs au parcours d’accueil.

Le CBAI recommande :

  • de continuer à soutenir les BAPA dans les actions qu’ils mettent en oeuvre pour l’insertion socio-professionnelle des personnes migrantes ;
  • de réviser les exigences administratives et rendre gratuites les procédures liées à l’équivalence de diplôme et de reconnaissance professionnelle pour les personnes inscrites dans un parcours d’accueil, à l’exemple de la Flandre ;
  • de porter une attention sur les nombreux projets-pilotes qui ont été déjà expérimentés et préparer leur pérennisation financière et leur mise à l’échelle ;
  • d’inclure l’exercice d’une activité professionnelle – au minimum à mi-temps – comme critère d’exemption de l’obligation de suivi du parcours d’accueil, à l’exemple de la Wallonie.

 

Concernant le logement, le manque d’un lieu de vie abordable et de qualité empêche l’intégration des personnes
migrantes et contrecarre les effets positifs du parcours d’accueil.

Le CBAI recommande d’assurer la cohérence entre la politique d’intégration et les politiques de logement, notamment en pensant des politiques de logement qui s’adressent également aux catégories précaires de la population.


Concernant les relations avec les administrations locales, afin d’améliorer la cohérence entre les dispositifs,  de fluidifier le suivi des bénéficiaires et d’éviter une charge de travail superflue, tant pour les BAPA que pour les CPAS et les communes, le CBAI recommande :

  • d’organiser et harmoniser la coopération et les procédures de communication entre les BAPA et les CPAS ;
  • d’instaurer une formation continue pour les employés·es communaux (Service Étrangers et État civil) sur les dispositifs du parcours d’accueil (BAPAs et BON), afin de clarifier la répartition des responsabilités entre les communes et les BAPAs, et les procédures de communication vers les publics cibles (public prioritaire et personnes étrangères).


Concernant la santé mentale, les difficultés psychologiques liées à des expériences migratoires et d’installation parfois traumatiques constituent un des points aveugles des politiques d’intégration en Belgique. Le CBAI recommande que les BAPA soient soutenus dans la mise en place de services spécifiques pour accompagner les personnes migrantes en besoin d’accompagnement psychologique.


Concernant plus spécifiquement les femmes migrantes, elles rencontrent des difficultés spécifiques dans leur intégration en Belgique. Le CBAI recommande de penser l’égalité de genre de façon transversale, y compris dans les politiques migratoires qui dépendent du fédéral, ainsi que de soutenir les BAPA dans la mise en place d’actions spécifiquement destinées à l’égalité et l’équité de genre.